Le commandant SS Rudolph Höss vit avec les siens dans une belle maison située en dehors des limites du camp de la mort d’Auschwitz, qu’il dirige avec beaucoup de zèle. Une famille qui jour après jour, fait montre d’une indifférence glaçante par rapport à la souffrance inimaginable des personnes qui régulièrement, arrivent dans le camp…
Succès surprise de ce début d’année, La Zone d’intérêt arrive en salle après avoir remporté le Grand Prix du Festival de Cannes l’année dernière. Un film à voir absolument, qui raconte l’indicible de façon inédite et ô combien éloquente.
L’horreur à portée d’oreille
La Zone d’intérêt n’est pas le premier film à traiter de la Shoah et ce n’est pas non plus le premier à choisir le camp d’Auschwitz pour illustrer son propos. En revanche, Jonathan Glazer, le réalisateur, découvert avec des œuvres comme Birth et Under the Skin, parvient à aborder son sujet d’une manière aussi surprenante qu’audacieuse. En effet, ici, point de séquences dans le camp de concentration en lui-même. Tout le film se déroule de l’autre côté du mur, dans la propriété où le commandant Rudolph Höss (qui a vraiment existé) mène une existence paisible avec son épouse et ses enfants. L’horreur des camps se matérialisant notamment à l’écran, sans discontinuer, par les cris de souffrance auxquels la famille semble ne plus faire attention.
Indicible vérité
Des cris se font entendre alors que les Höss dînent en famille ou s’amusent avec leurs invités dans leur beau jardin fleuri. Il y a aussi de réguliers coups de feu, qui résonnent de jour comme de nuit. Parfois, quand le vent est défavorable, les cendres en provenance des fours crématoires se déposent sur le linge qui est en train de sécher. Des cendres utilisées par les jardiniers pour fertiliser la terre. Sans oublier ces vêtements dérobés aux prisonnières que l’épouse du commandant partage avec ses amies dans une insouciance tellement révoltante qu’elle donne la nausée…
Si de prime abord La Zone d’intérêt semble moins démonstratif que des films comme La Liste de Schindler, en réalité, il l’est tout autant. Ici, l’horreur est partout et notamment dans le décalage entre le quotidien lumineux d’un homme qui a dédié son existence à imaginer et concevoir des solutions d’extermination afin d’honorer les désirs d’Hitler, et la mort qui est à son œuvre de l’autre côté du mur.
Un film important
Filmé dans une maison construite tout spécialement, en dehors des limites du véritable camp d’Auschwitz, La Zone d’intérêt raconte donc la Shoah à travers un épisode de la vie d’un monstre. Un homme qui a joué un grand rôle dans la mort de plusieurs centaines de milliers de personnes de confession juive pendant la Seconde Guerre mondiale. Un criminel de guerre qui est ici présenté à travers un incroyable paradoxe. Une manière de rappeler que les monstres existent. Ces derniers, loin de se terrer sous les lits, préfèrent avancer à découvert.
Film d’une importance capitale, La Zone d’intérêt est donc à voir de toute urgence !
Image : A24/Bac Films